Riant à gorge déployée, je glisse les yeux sur ma montre et je sursaute légèrement. Une légère grimace déforme mon visage alors que je me lève rapidement. « Désolée les filles, il faut que je rentre. Je dois me lever aux aurores demain » Je dépose un léger baiser sur la joue de mes amis, enfile ma veste et me dirige vers la sortie de ce bar dans lequel nous sommes depuis trois bonnes heures. Depuis le début de la soirée, nous fêtons les vingt cinq ans d'une amie rencontrée en Amérique du Nord. Il est vingt deux heures et le soleil est toujours présent. Bien que nous sommes bientôt en hiver ici, il fait beau, chaud et ce jusque tard. Je n'ai qu'une petite vingtaine de minutes de marche pour rentrer chez moi et je profite du temps pour me balader. Je fais un léger détour par un parc de la ville et m'assis sur un banc. Je pose une main sur mon ventre et soupire. Il ne me reste plus qu'une semaine pour trouver quoi faire. Avorter ou garder cet enfant dont je ne veux pas vraiment. Son père a pris la poudre d'escampette en apprenant son existence et je ne sais plus quoi faire. Personne n'est au courant et je préfère que cela reste ainsi, en quelque sorte parce que j'aurais bien besoin d'aide, de soutien. Mais je ne veux pas me réduire à ça ; à devoir m'exposer au monde pour une question qui ne devrait pas se poser. Je reste là quelques longues minutes, à réfléchir à tout, absolument tout. Alors que je me décide de rentrer, j'entends mon portable sonner au fin fond de ma pochette noire et le sort à toute hâte. J'espère qu'il s'agit d'Austin ou de mon agent, les deux hommes les plus importants pour moi à l'heure actuelle. Le léger sourire qui se trouvait sur mes lèvres disparaît instantanément. Il ne s'agit que d'un appel de mon oncle qui se trouve à l'autre bout du monde. Je passe quelques minutes avec lui au téléphone tout en sortant du parc. Je prends une rue puis une autre et raccroche. Depuis que j'ai quitté les Etats-Unis, ils prennent des nouvelles de mois toutes les semaines et ce depuis trois ans. Que ce soit mon oncle, ma tante ou mes cousines, ils sont tous là pour moi et je devrais leur en être reconnaissant mais j'ai envie d'être un peu seule, au calme. C'est hypocrite en sachant que je rêve de trouver une solution quant à ma grossesse. Je baisse les yeux pour ranger mon portable et quand je les relève, je vois un jeune homme se diriger vers moi, marchant dans le sens inverse de ma propre marche. Il est normal de se balader par se temps mais lorsqu'il se rapproche de moi et que je croise son regard, mon sang se glace. Pas lui, pas lui, pas lui. Instantanément, je tourne les talons et fais demi tour. Si j'accélère le pas, je pourrais toujours passer par ailleurs sans qu'il fasse tant attention à moi que cela. Seulement, je sais très bien que les échasses sur lequel je marche depuis quelques minutes sont un véritable poids à la cheville. Je n'arriverais jamais à le semer, pas maintenant. Sans compter que les rues qui se trouvent à ma droite sont de plus en plus sombre. Je déglutis avec difficulté et m'enfonce dans une ruelle, priant pour qu'il prenne une autre rue. J'attends là, collée au mur comme une enfant de deux ans mais cet homme me fait froid dans le dos. Il a été condamné pour une histoire de meurtre suite à des coups. Tout cela me rappelle l'histoire avec mon père, ce que j'ai vécu de mes huit à dix ans, avant qu'il ne finisse derrière les barreaux. Je compte dans ma tête. Il a du partir. Je tente de retrouver un rythme cardiaque correcte et tend la tête pour voir s'il est toujours dans le coin. Il a du rencontrer un contre temps sur son chemin car il arrive au même moment. Notre regard se croise et je me crispe. Il fronce les sourcils et je porte une main au niveau de mon corps, exerçant carrément un mouvement de recul. Je le regarde, plongeant la main dans mon sac, prête à appeler les urgences de la ville au cas où il m'arrive quoi que ce soit... Je suis paniquée comme jamais, paniquée comme si je me retrouvais face à mon père, à cet homme qui a tué ma mère et a failli en faire de même avec moi.