Dana toise son reflet dans le miroir de sa salle de bain. Elle replace une mèche rebelle, ajuste ses sous-vêtements d'un rouge passion, enfile une robe, puis corrige une dernière fois son maquillage. C'est son rituel, maintenant. Depuis plus d'un an en fait. Avant de se jeter dans la fosse aux lions, avant d'exercer ce job qui lui fait honte. Pourtant, elle ne s'est jamais senti aussi bien que depuis qu'elle le fait, ce job. Cela lui a permis d'oublier. D'oublier les trois dernières années de sa vie qui ne furent que chaos. S'abandonner à d'autres hommes, à d'autres femmes pour se laisser aller aux plaisir de la chair. Une bouffée d'oxygène pour ne pas sombrer. Parfois, des flashbacks lui reviennent. La dispute, l'embardée, ce couloir d'hôpital, ce cercueil. Il lui arrive de penser qu'elle aurait dû être à sa place. Elle s'appuie sur le lavabo, se regarde une dernière fois, et claque la porte. Jason lui a envoyé un message, plus tôt dans la journée. Un groupe l'a engagé pour faire une surprise à un ami. Elle aurait préféré rester bien sagement chez elle à fumer un joint devant la télé, mais business is business. Finalement, elle lâche un soupir, enfile son manteau, attrape ses clés puis quitte l'appartement. Elle ne met que quelques minutes afin de se rendre au point de rendez-vous. Un hôtel. Pas tellement intime, mais cela fera l'affaire. Chambre 315. Elle ouvre la porte, épie la pièce. Mouais, peut mieux faire. Elle avance, fais glisser ses doigts sur les meubles. Doucement, elle fait glisser son manteau, puis sa robe. A côté du lit, une bouteille de champagne. Un sourire se dessine sur les lèvres de la blonde. Autant commencer la soirée en beauté. Elle verse le liquide dans une flûte, se poste face à la fenêtre pour admirer la vue. Le coucher de soleil est magnifique. Elle attends, patiemment. Quinze minutes, trente minutes. Au bout de quarante-cinq minutes, quelqu'un frappe, une fois. Elle somme d'entrer, ne bouge pas. En fait, elle n'ose même pas se retourner pour voir qui est là personne avec qui elle va partager ces draps. Pourtant, elle ne devrait pas. Elle fait cela tout le temps. Ca n'empêche pas qu'elle se sent horriblement sale à chaque fois qu'elle le fait. Comme si elle avait l'impression de tromper le seul homme qui a compté pour elle.

à peine était-il rentré, qu'on lui faisait une surprise, et quelle surprise. on lui avait dit de se rendre à tel endroit, à telle heure. soit, il allait s'y plier et y aller, après tout, c'était un cadeau de retour, plus ou moins, il ne pouvait qu'apprécier ce que ses sauces avaient prévu pour lui, bien qu'il avait tendance à se méfier des idées un peu bancales qu'ils pouvaient avoir parfois, il préférait leur faire confiance pour cette fois. au pire, il se vengerait, si c'était chiant, sans intérêt, nul à chier, il leur rendrait. leif, c'était le mec con par excellence, trouver des vieux plans pour n'importe qui et avoir sa dose de foutage de gueule ensuite, c'était son dada. pire que la dope, limite. ça l'amusait. alors s'il pouvait le faire aux autres, ses potes pouvaient aussi y passer. le blond s'était rapidement préparé, un slim, une paire de vans déchirées, délavées, tellement usées qu'on se demandait à quoi elles avaient pu servir, un marcel large bleu clair et il était en chemin. chambre trois-cent-quinze, il devait aller dans cette piaule, et découvrir son fameux cadeau. il avait déjà sa petite idée, c'était bien trop facile, un hôtel, la logique voulait qu'une fille l'attende, une pute, en gros, ou juste une bonne conne. autrement, il ne voyait clairement pas ce qui pouvait l'attendre dans une chambre d'hôtel. il monta les escaliers, il prenait son temps, comme s'il voulait que le suspense dure encore un peu, il se mettait lui-même une certaine pression, et arrivé devant la porte de la fameuse chambre, il avait autant envie d'entrer que de redescendre. leif, c'était pas le type à qui on faisait une surprise. il n'aimait pas ça, il n'aimait pas la boule au ventre qu'on pouvait ressentir avant, il n'aimait pas s'imaginer des choses pour être finalement totalement déçu et dans le cas actuel, il espérait clairement y trouver une meuf. sinon, il allait être déçu. alors il toqua puis ouvrit la porte pour la pousser, et entrer dans la chambre. un sourire se dessine très rapidement sur les lèvres du blondinet. une fille se tient devant lui, de dos. trop facile dit-il pour lui-même. il avait deviné, ses potes étaient bien trop prévisibles pour réussir à le surprendre. il s'approcha. son sourire n'eut pas le temps de s'installer trop longtemps, elle se retourna. et même s'il aurait pu reconnaître, même de dos, cette fille entre mille, il était choqué, maintenant qu'elle était là, devant lui. il ne laissa rien paraître, aucune expression n'était visible sur son visage. elle, ici ? c'est quoi c'délire ? il ne comprenait pas, ne captait rien, il se sentait con, comme si on avait voulu lui faire une mauvaise blague et si ça avait été le cas, c'était clairement dégueulasse. il ne put s'empêcher de l'observer, de haut en bas, en passant par ses courbes parfaites, son regard qui d'ailleurs actuellement semblait autant perdu que le sien face à la situation, elle était terriblement sexy, peut-être même un peu trop. j'me suis genre trompé de chambre, en fait ? t'attends ton plan cul ? les remarques fusaient, il ne perdait pas de temps mais en vu des vêtements qu'elle portait et de l'endroit où elle était, il ne voyait pas d'autres alternatives. quoi qu'il en soit, elle ne l'attendait pas, lui.

La porte s'ouvre et grince. Dana garde les yeux posés sur l'horizon. La mascarade va commencer. Elle se retournera, son regard se plantera dans le sien. Elle fera un pas, puis deux, jusqu'à sentir son souffle sur son visage. Ses doigts glisseront sur son torse afin de lui enlever doucement son t-shirt. Et là, elle le poussera jusque sur le lit pour entamer une danse endiablée. Ce n'est devenu que pur automatisme. Sans saveur, sans envie. Juste un travail comme un autre. Un travail sale, mais un travail quand même, qui lui permet de payer son loyer et ses études. Pourtant, c'est une fille bien Dana. Elle s'est juste retrouvée dans cette spirale sans le vouloir réellement. Juste parce qu'elle a besoin d'argent. Des bruits de pas, s'approchant. Dana se pare de son sourire le plus provocant. Elle pivote lentement, lui fait face. Son sourire tombe, elle scrute chaque centimètre de son visage. Pas de doutes, c'est bien lui. Elle connaît chaque recoins de son épiderme, elle ne peut pas se tromper. Elle échappe son prénom en un soupir. « c'est quoi c'délire ? » demande-t-elle, autant à l'aise qu'elle. Donc pas du tout quoi. Ouais, un putain de gros délire. Une blague de très mauvais goût. Ou alors, Dieu se fout bien de sa gueule. Elle sent son regard courir sur elle. Instinctivement, elle place ses bras devant. Geste complètement stupide, puisqu'il l'a vu nue des centaines et des centaines de fois en deux ans. « bonne question. » lance-t-elle, alors qu'elle lâche un énième soupir. Sacré bordel. Et puis, qu'est-ce qu'il fait là, Leif ? Il a disparut de la circulation il y a un moment déjà. Et puis, elle a apprit au détour d'une conversation qu'il avait quitté l'Australie. Alors que fait-il ici, devant elle, à se poser autant de question qu'elle ne s'en pose ? « j'me suis genre trompé de chambre, en fait ? t'attends ton plan cul ? balance-t-il. Dana roule des yeux. Oh, très drôle Leif, très drôle. Si ce n'est que ça. Mais non, c'est bien plus compliqué. « j'aurais bien voulu, mais pourtant c'est bien toi qui est là. rétorque-t-elle, arquant un sourcil. je... travaille. » finit-elle par avouer, avant d'attraper sa robe et de l'enfiler, afin d'être plus décente. « maintenant sors. » ordonne-t-elle, d'un ton détaché, croisant les bras contre son tronc.

sacré hasard. putain, il avait l'air bien con, là, sans oser faire un pas de trop vers elle, comme s'il voulait garder une distance entre eux, comme un gamin qui ne voulait plus avancer parce qu'il ne se sentait plus en sécurité, parce qu'il n'était plus dans sa bulle. c'était un peu ça, dana, elle ne faisait plus partie de sa vie, il ne l'avait pas vu depuis un long moment et il essayait de l'oublier comme il pouvait, parce que même s'il était fier, s'il ne le montrait pas, s'il allait jusqu'à dire à ses potes qu'il en avait plus rien à foutre, de cette meuf, il y tenait encore sacrément. il l'observait, comme s'il redécouvrait ses formes, ses courbes, son visage, ses cheveux, tout. elle semblait autant surprise que lui, signe qu'elle n'était pas l'investigatrice de cette mauvaise blague. ses potes peut-être ? ils n'étaient pas aussi cons que ça. en tout cas, elle était bien là, en face de lui. elle quoi ? leif arqua un sourcil. elle travaillait. elle venait bien de lui dire, qu'elle travaillait. en vue de la façon dont elle était habillée, il ne fallait pas être un expert pour deviner quel genre de travail elle pouvait faire. il sourit avant de lâcher un rire, plus nerveux qu'autre chose. tu travailles ? demanda t-il comme pour avoir confirmation, un tantinet moqueur, surtout choqué. elle lui demande de sortir, leif ne l'entend pas. il s'approche légèrement en regardant la chambre. ça va, beaucoup trop luxueux. tu bosses, donc ? t'es sérieuse ? il leva les yeux au ciel, puis sans lui laisser le temps de répondre, reprit aussitôt tu fais la pute ? son ton devenait de plus en plus critique. c'était de toute façon quelque chose qu'il n'allait pas accepter, elle avait beau être son ex, ne plus faire partie de sa vie, elle y avait occupée une place importante.