« Ce soir au moonshine ? Ouais, j'suis partante. Vingt-deux heures ? Ca m'va. A ce soir.» lança-t-elle, alors qu'elle raccrocha son téléphone. Elle se laissa tomber sur le lit, les deux mains sur la poitrine. Cela commençait à devenir une habitude, ces derniers-temps. Sortir tout les soirs, retrouver ses potes, s’imprégner de vodka, et rentrer complètement paumée. Une p'tite routine, un bol d'air frais. Simplement pour oublier toute les tuiles qui lui tombait sur la gueule un peu plus chaque jour. Elle devait avoir un truc qui clignote au-dessus de sa tête avec écrit 'aimant à emmerdes', c'était certains. Ou alors une petite fée s'était penchée sur son berceau et lui a susurré à l'oreille 'toi ma grande, je te promet une vie pleine de péripéties, et ne me remercie pas'. Bien sûr que non, elle n'allait pas la remercier, cette pétasse. Premièrement, il y avait Timy. Lynly n'arrivait même pas à mettre un mot sur leur relation en ce moment. Il s'éloignait, jour après jour, et cela la mettait en rogne. Au fond d'elle, elle lui en voulait. Il était comme son frère après tout. Un frère n'était-il pas sensé être constamment auprès de sa petite soeur, même si leur relation n'était pas au beau fixe ? Lui, non. Mais elle ne pouvoir pas lui en vouloir. Elle aussi avait décidé de prendre de la distance, suite à ce qui s'était passé entre eux. Alors elle préférait le prendre comme un juste retour des chose. Et secondo, il y avait Leon, ce connard sur patte. Ce n'est pas étonnant que tout le monde le fuit. Tel un chat sauvage, il prend la poudre d'escampette quand on ose l'approcher de trop près, refuse que quelconque personne croise son chemin. Un abruti fini dénué d'émotions. Avec lui aussi elle avait décidé de lâcher l'affaire, lasse d'être la bonne poire, lasse de déplacer des montagnes dans le vent. Qu'il croupisse tout seul dans son appartement merdique, qu'il se tue à petit feu. Elle abandonne. Après un instant de réflexion, elle décida de se relever, afin de se préparer. Elle savait que si elle était en retard, Enora allait la tuer. Face au miroir, ses doigts se promenaient dans sa chevelure blonde, les faisant tanguer légèrement. Une dernière retouche de maquillage, l'ajustement de sa robe et elle était prête pour se déhancher sur la piste de danse.
A l'entrée du Moonshine, Enora était déjà là, faisant les cent pas. Décidément, elle était encore plus à l'heure que les gens ponctuels celle-là. Son éternel discours aux lèvres : 'Lyn, t'abuses, j'suis sûre que même quand tu t'marieras tu seras en retard'. Elle roula des yeux. C'était toujours la même chose. Elle préféra entrer dans le club plutôt que d'écouter un mot de plus. La soirée s'est déroulé sans accro. Un, deux verres. Elle se déhanche sur la piste, un sourire sur les lèvres. Trois verres. Elle rit aux blagues de ce garçon qui n'est pas vraiment drôle mais carrément canon. Quatre, cinq, six verres. Ses gestes deviennent plus saccadés, ses pas de danse plus sexy. Sept, huit verres. Sa vision se trouve, le parquet tangue. Neuf verres. Le dernier. Elle avait atteint ses limites. Elle regarda autour d'elle, pas l'ombre d'Enora. Elle devait sûrement être rentrée. Elle lâcha un soupir, puis quitta l'établissement. Dehors, la noirceur recouvrait le ciel. Elle se tenait un instant contre le mur, afin de ne pas tomber. Elle lâcha un rire, se moquant royalement d'elle-même. Il était beau, le tableau. Complètement déglinguée, stone. Elle avança un moment dans la rue. Elle s'arrêta devant un muret. Alors Lynly, cap ou pas cap ? Eternelle phrase qui raisonnait dans sa tête. Un sourire sur les lèvres, elle grimpa tant bien que mal dessus, avançant, doucement mais sûrement, sifflant. Bien sûr, qu'elle était cap.

Semblable à un funambule, Lynly avait l'impression d'être libre. Libre comme un oiseau, bien loin des préoccupations qui avait envahit son esprits quelques heures auparavant. Ses cheveux virevoltaient au gré du vent, elle se tenait droite comme un i, son regard figé sur un point afin de ne pas tomber. Hors de question de se retrouver à l'hôpital pour une cheville en vrac ou parce qu'elle s'est ouverte le front. Un sourire étirant légèrement ses lèvres, elle arrêta de siffler un moment. Elle avait été cap, comme d'habitude. Elle savait que ce jeu la perdra un jour, mais peut importe. Après tout, elle était seule maître de son destin. « j'l'ai attendu, le gramme que tu devais aller chercher l'autre soir.  » entendait-elle alors, toujours vissée sur son muret comme une ballerine sur une boîte à bijoux. Son regard dévia, elle se retourna. Il faisait sombre, elle fronça les sourcils pour regarder au loin. Elle arriva à distinguer une silhouette au bout de quelques minutes seulement, se tenant contre le mur, pour ne pas tomber au sol. Leon. Leon Sahores. Ce connard, ce fils de pute. Il avait autre chose à foutre que venir ici lui ? Il accepte pas les sdf dans cet établissement, dommage pour lui. Il devrait pas être là, sa place était entre un clodo qui pue la mort et une poubelle. Elle resta immobile un instant, avant de descendre à la hâte et de s'avança vers lui d'une cadence rapide. Nez à nez, sa main partit toute seule se plaquer contre la joue de son interlocuteur, geste qui avait légèrement raisonné dans la rue. Elle sentit des picotements dans sa main, elle secoua donc sa main frénétiquement. Ce p'tit merdeux l'avait foutu en rogne il y a quelques jours, cela la soulageait un chouïa. « tu peux t'le foutre au cul ton gramme. Connard.  » lança-t-elle, avant de se reculer, arquant un sourcil. « tu m'excuseras mais j'me casse, j'ai pas envie qu'on m'voit parler avec un clochard.  »  finit-elle par dire, tournant les talons et arpentant maintenant le trottoir. Il croyait quand même pas qu'ils allaient se tenir la mains et se faire des tresses. Abruti. Bordel de merde. Va chier connard.

« j'm'attendais à un câlin, plutôt.  » qu'il disait. Réaction typique de Leon. Cela faisait quelques mois qu'elle le "côtoyait" maintenant le jeune homme, elle pouvait donc dire qu'elle le connaissait un peu. Elle ne s'attendait pas à une autre réponse de toute manière. Leon, c'était le genre de mec à tout prendre à la légère, un je-m'en-foutiste en puissance. Lui, les sentiments des gens, le fait de faire du mal, ou d'humilier quiconque lui passe au dessus. Il ne voit que son petit intérêt personnel. Avec le temps, elle avait apprit à vivre avec, mais là, elle avait atteint ses limites. Elle détestait qu'on lui manque de respect, et elle était tombée sur le mauvais mec pour ça. Elle avait son amour propre elle aussi, il n'y avait pas uniquement que lui. Et se faire traiter de la sorte, hors de question. « pauvre con.  » crachait-elle entre ses dents, son visage restant neutre. Elle était vulgaire, ouais. Mais face à lui, elle ne pouvait s'en empêcher. Elle voulait lui tenir tête, lui montrer que ce n'était pas un minable comme lui qui allait prendre le dessus sur elle. C'était la loi du plus fort. Pourtant, à la base, ce n'était pas le but de Lynly. Elle voulait simplement l'aider, se rendant compte des capacités non exploitées du jeune homme. C'était sans compter sur Leon et son putain d'orgueil mal placé. Trop bonne, trop conne. Elle avait donc préféré prendre la fuite qu'entendre un mot de plus. A peine lui avait-elle tourné le dos qu'elle sentit ses doigts encercler son frêle poignet. Elle tourna la tête et fixa celui-ci, grimaçant légèrement. « fais attention à c'que tu dis, sérieux. j'suis pas un de tes abrutis de potes à qui tu penses pouvoir parler comme de la merde, malgré tout le respect que j'leur dois pour réussir à te supporter. » balançait-il, ses prunelles plongées dans les siennes, lâchant enfin son poignet. Elle ramena celui-ci dans son autre main, tiquant un coup. Elle l'observa un moment, puis lâcha un rire. « garde tes menaces, lança-t-elle, chancelante. tu m'fais pas franchement peur. » rajoutait-elle. Elle fit un pas, deux pas, trois pas en arrière. « et si tu veux m'en mettre une, fais-le hein. J'suis anesthésiée là. » dit-elle, mimant le fait de boire un verre. Ca ne l'étonnerait même pas qu'il puisse faire ça. Plus rien ne l'étonne de lui de toute façon. « et puis pourquoi tu m'parles leon, hein ? t'as eu s'que tu voulait nan ? » dit-elle en faisant allusion à leur conversation par texto. Elle secoua la tête par la négative, puis tourna les talons une seconde fois pour tracer sa route, tant bien que mal.

Elle planait. Littéralement. Malgré les litres d'alcool ingérés, elle ne s'était jamais senti aussi vivante. Plus aucunes questions d'éthiques, plus de morale, plus de limites. Dans le fond, c'était la vraie Lynly qui se manifestait, elle le savait. Pas la bonne poire qu'elle était devenue. Pourtant, la vision de Leon là, devant elle, contrastait avec ce bien-être soudain. Une certaine aversion montait en elle. Toute ces années à éviter ce genre de mecs. Les mecs à emmerdes, les p'tit bad boy de bas-étage qui se la joue âme noir, qui tuerait père ou mère pour se droguer. Cependant, cette fois-ci elle avait mit les deux pieds dans le plat. Pourquoi ? Elle ne savait pas vraiment. Peut-être pour sa gueule d'ange à qui on donnerait le bon dieu sans confessions. Peut-être pour son air paumé qui lui a donné envie de l'aider. Tu parles d'une connerie. « j't'avoue que la proposition est tentante, mais j'préfèrerai que tu t'en souvienne et que tu la sentes passer, donc j'vais m'abstenir. » lança-t-il, le ton de sa voix restant toujours neutre. Ah ouais, il tape sur les nanas aussi ? De mieux en mieux. Elle avait bien fait de s'éloigner de lui tiens, ça lui évitera de se retrouver avec pleins de bleus sur la figure. Elle haussa les épaules. « dommage, l'offre n'était valable que ce soir. Et puis, taper sur une meuf... T'es vraiment une baltringue. » lança-t-elle, fronçant les sourcils. Un vrai sans coeur. Elle avança donc, tant bien que mal. Ses pieds n'étaient carrément plus coordonnés avec le reste de son corps. De temps à autre, elle se cognait dans le mur. Leon était encore présent, le bruit de ses pas raisonnant derrière elle. « tu vas où comme ça ? t'rentres chez toi ? t'es un peu bancale, j'trouve. » disait-il, la suivant. Elle ne prit même pas la peine de se retourner, n'attendant qu'une chose : qu'il foute le camps une bonne fois pour tout. « depuis quand tu t'préoccupes de ce que j'peux faire ? » rétorqua-t-elle, s'apprêtant à traverser la route. Elle tourna légèrement la tête vers lui. « j'sais pas où je vais, mais par contre, j'sais une chose : c'est que t'as rien à foutre ici, à me suivre. Va te trouver une occupation. » finit-elle par dire. Elle ne voulait plus voir sa tête, plus entendre le son de sa voix ni ses remarques à deux francs six sous. Elle voulait qu'il la laisse tranquille.

les rôles s'inversaient. il lui courrait après, et elle le repoussait, elle ne voulait pas de lui, elle le voulait loin d'elle et il n'était pas con, il avait capté. elle avait été blessée dans sa fierté et elle l'envoyait chier comme lui l'avait fait quelques jours auparavant. il ne lui en voulait pas, il comprenait même le geste. pire, ça l'amusait. puis elle était ivre, complètement ivre, elle n'allait peut-être pas s'en rappeler le lendemain, alors leon pouvait encore être le plus gros con de l'univers, avec un peu de chance, elle ne s'en souviendra pas. elle avançait, il suivait. depuis quand tu t'préoccupes de ce que j'peux faire ? encore une fois, elle soulevait la bonne question. au fond, il l'appréciait, parce qu'elle ne le prenait pas pour un vulgaire merdeux, contrairement à ce qu'elle lui disait. elle était attachante, malgré tout. alors il ne se vexait pas, préférait passer au dessus et prendre la situation à la rigolade. elle ne semblait pas apprécier, tant pis. j'm'en suis toujours préoccupé. t'es trop importante pour moi, lynly répondit-il en lâchant un léger rire. elle s'arrêta devant la route, leon l'imita. j'sais pas où je vais, mais par contre, j'sais une chose : c'est que t'as rien à foutre ici, à me suivre. Va te trouver une occupation. il plissa légèrement les yeux, regardant la route, à gauche, puis vers la jeune femme. il esquissa un sourire. tu disais ? demanda t-il en passant un bras autour de son cou pour l'attirer vers lui. taquin, con, chiant et tous leurs synonymes, ouais. leon aimait jouer avec ses nerfs, et plus elle s'énervait, l'insultait et lui demandait de la laisser tranquille, plus il continuait. parce que c'était son dada, d'embêter les jolies filles. et puis celle-là était ivre, alors c'était encore plus facile. c'bon arrête de t'énerver toute seule severide, viens on prend une trace. t'aimes ça en plus toi ? droguée. et il continuait.

 « j'm'en suis toujours préoccupé. t'es trop importante pour moi, lynly. » ironisait-il, accompagné d'un rire portant sur tout la rue. Enfin, qui raisonnait bien dans ses oreilles et qui lui donnait mal au crâne. Elle roulai des yeux en poussant un soupir, relâchant ses bras contre son buste. Dans le genre relou, on ne pouvait pas faire pire. Lynly, pourquoi t'as voulu aidé un mec comme ça ? Là, elle n'avait qu'une seule envie : lui planter ses ongles dans les yeux pour qu'il la ferme. Ou alors lui faire bouffer du sable, au choix. Mais elle préférait ne rien dire, pour ne pas lui donner le plaisir de la voir pestiférer envers lui et voir sa mine satisfaite. Parce qu'il carburait à ça, Leon. Pousser les personnes jusqu'aux derniers retranchements pour qu'ils explosent ou qu'ils le frappent. Et après, seulement après, il est satisfait. Il était quand même sacrément maso pour un mec qui a souffert durant son enfance. Et puis, son air je-m'en-foutiste allait la rendre folle. Comme en ce moment même. « tu disais ? » demandait-il, passant son bras autour de son cou en mode détente. Ses yeux devinrent ronds comme des billes. Elle recula, manquant de tomber par la même occasion. Elle était déjà assez chancelante comme ça, il cherchait vraiment à enfoncer le clou ce con. « je disais que tu ferais mieux d'éviter ce genre de geste envers moi, si tu veux pas te retrouver manchot.  » répondit-elle, attrapant sa main du bout des doigts pour la rejeter vers lui. Son regard se reportait sur la route. Elle fronça les sourcils et plissa les yeux afin de mieux observer si la route était dépourvue de voitures. Sa vision se troublant, difficile de s'en rendre compte. Apparemment, c'était affirmatif. « c'bon arrête de t'énerver toute seule severide, viens on prend une trace. t'aimes ça en plus toi ? droguée. » la titilla-t-il. Lynly commençait vraiment à perdre patience. D'habitude, elle était plutôt sympa, comme nana. Mais l'alcool ne la rendait pas vraiment cool, mais carrément conne. Et là, elle n'en pouvait plus de lui. Ses petites remarques, il fallait qu'il les garde pour lui, ou qu'il aille ailleurs. Après tout, il y avait pleine de pigeonnes à aller emmerder ou à sauter en sortie boîte. Elle ne savait même pas pourquoi il perdait son temps à lui parler. Elle fit mine de rigoler comme une gourdasse en passant sa main dans les cheveux pour changer de visage en une seconde et redevenir sérieuse. « tordant, vraiment. et ton humour, tu l'as hérité de ton père ou de ta mère ?  » lança-t-elle, arquant un sourcil, avant de traverser la route. « garde ta poudre pour tes putes.  » continua-t-elle, alors que les phrases d'une voiture l'éclairait légèrement au loin, et qu'un coup de klaxon retentit. Elle tourna la tête, puis s'empressa d'aller sur le trottoir d'en face. Elle lâcha un second rire. « wow! un peu de plus, et t'allais devoir insulter une pierre tombale.  » dit-elle, en passant son pouce sous sa gorge. Cette insouciance la tuerait un jour, sûrement. A force de passer son temps à surpasser sans cesse ses limites, elle finira par tomber sur un os. Il fallait peut-être songer à arrêter ces enfantillages, parce qu'à vingt-et-un ans, laisser un stupide jeu régir sa vie était être réduite à être une assistée. Restant immobile un moment, elle finit finalement par se remettre en route, espérant rentrer chez elle, bien qu'elle ne savait plus vraiment où elle était.

elle ne voulait pas qu'il soit ici, avec elle, alors plus elle allait lui demander de s'en aller et de rester loin d'elle, plus il allait rester et la suivre. au fond, il se disait que s'il restait avec elle, elle n'allait pas faire n'importe quoi ou tomber sur des mecs louches, en vue de son état, elle n'était pas en mesure de se défendre si on l'emmerdait, et puis, il fallait l'avouer, elle le faisait bien marrer, avec ses remarques, son air de bourrée tout juste sortie de boîte, comme si elle savait pertinemment où aller alors qu'elle était complètement perdue et ne savait même plus comment rentrer chez elle. je disais que tu ferais mieux d'éviter ce genre de geste envers moi, si tu veux pas te retrouver manchot. il hocha la tête. elle se voyait menaçante, maintenant. de mieux en mieux. elle le repoussa finalement alors qu'il passa son bras autour d'elle. tordant, vraiment. et ton humour, tu l'as hérité de ton père ou de ta mère ? elle avait trouvé le point sensible, ses parents. quels parents ? il resta alors silencieux et regarda ailleurs. il ne voulait pas s'énerver, alors il restait muet. parce que quand quelque chose le blessait, il ne l'ouvrait plus, il préférait se renfermer sur lui-même, c'était plus facile, ouais, plutôt que de s'énerver et montrer qu'il avait une corde sensible. une lumière fit irruption alors que lynly se tenta à traverser la route, complètement inconsciente. un coup de klaxonne retentit, elle se tourna vers lui pour lui dire qu'à quelques secondes près, elle serait passée par dessus la voiture. il leva les yeux au ciel avant d'avancer pour se trouver à sa hauteur sur le trottoir d'en face, l'attraper par le bras cette fois non pas dans le but de l'agacer mais plus pour l'empêcher de faire n'importe quoi comme elle venait tout juste de le faire. ta gueule se contenta t-il de répondre. il s'était inquiété une fraction de seconde. juste une fraction, mais ça suffisait. arrête un peu de faire la grande. tu sais même plus où tu dois aller. j'habite à trois minutes d'ici, alors soit j'te ramène chez moi, soit tu te démerde pour rentrer chez toi, j'compte pas traverser la ville pour tes beaux yeux. il la lâcha alors pour sortir un paquet de cigarettes bien abîmé de la poche de son sweat, et s'en griller une.

Son coeur battait à rompre. Lynly ne savait pas vraiment si c'était de l'adrénaline, ou peut-être de la panique. Elle avait l'air tellement sûre d'elle au milieu de tout ces gens, mais dans le fond, elle avait eu peur. Et si elle avait été un brin moins réactive ? Elle se voyait déjà, étendue sur ce sol, le front en sang, fixant au loin les camions de pompier et leur lumière clignotant. Peut-être aurait-elle eu seulement de légères commotions, peut-être aurait-elle été paralysée à vie. C'était complètement stupide. Pourtant, elle n'allait pas s'arrêter comme ça, elle le savait. Lui prenait de la drogue, elle se droguait comme ça. C'était sa dose qui la maintenait en vie. L'adrénaline. En faisant volte-face, elle sentait que son coeur reprenait un rythme normal. Leon était toujours là, sur le trottoir d'en face. Au bout de quelques instants, le jeune homme rompit la distance en la rejoignant de l'autre côté de la route. Son regard se posa sur la main de ce dernier lorsqu'il attrapa son bras. « ta gueule » balançait-il, d'un ton neutre et contrôlé, comme à son habitude. Ses prunelles se plongèrent dans le vert de ses yeux. Est-ce qu'au moins une fois dans sa vie Leon pourrait-il être un peu plus respectueux ? A croire que c'était au-dessus de ses moyens. Pas étonnant qu'il soit si peu recommandable. « arrête un peu de faire la grande. tu sais même plus où tu dois aller. j'habite à trois minutes d'ici, alors soit j'te ramène chez moi, soit tu te démerde pour rentrer chez toi, j'compte pas traverser la ville pour tes beaux yeux. » lui proposa-t-il. Lynly arqua un sourcil. On pourrait presque croire qu'il avait un coeur. Elle faisait donc tellement pitiée que même le camé du coin voulait lui venir en aide. Sur le coup, elle ne savait pas si elle devait mal le prendre. « me ramener chez toi ?  » répétait-elle. Elle lâcha un rire, à la fois surprise et décontenancée. La blonde n'arrivait pas à le suivre. Les personnes qui passaient d'une humeur à une autre, ce n'était pas sa came. « tu joues à quoi leon ? hier tu m'envoies bouler comme la dernière des merdes, ce soir tu me proposes de dormir chez toi parce que j'ai le crâne à l'envers, et demain, ça sera quoi ? tu me vireras de chez toi à sept heures tapantes à grands coups de pieds dans le cul ? j'suis pas un pantin.  » pestait-elle. Attitude de petites filles bourrées mais les idées plus que claires. Elle ne savait pas ce qu'il voulait, et c'était bien ça le plus frustrant. Elle se sentait plus à l'aise et en sécurité quand elle arrivait à cerner son entourage. Or, avec leon, elle n'y arrivait pas. Ni son regard ni son attitude lui montrait quelconque ressentis. Elle passa la main sur son visage en poussant un soupir. « excuses-moi.  » finit-elle par lâcher. Elle ne voulait pas s'emporter, mais c'était plus fort qu'elle. Une carapace qu'elle s'était forgée en sa présence, pour encaisser les coups. Peut-être qu'au fond, il voulait vraiment l'aider. « je... okay, j'te suis. de toute façon, ça ne peut pas être pire que maintenant.  » poursuivait-elle, posant ses mains sur ses hanches. Timy et Alex allait sûrement s'inquiéter, mais peu importe, il valait mieux crécher chez lui que de finir en steak tartare sur le bord de la route.