Une pièce sombre dénuée de chaleur humaine. Sur les murs, seul le grand créateur prône, signe d'une adoration beaucoup trop grande à son goût. Elle est là, face à ce piano, depuis un nombre incalculable d'heures. Sa mère Marie se tient derrière elle. Une beauté froide qui ne montre pas la moindre expression. Qui n'en a jamais montré depuis qu'elle est sur cette terre. Ses doigts survolent, jouent des notes qu'elle connaît depuis la nuit des temps. Plus vite. Les yeux rivés sur l'instrument, elle s'exécute, sans poser la moindre question. Plus vite. Elle, ce qu'elle veut, c'est frémir sous les cordes d'une guitare, en apprécier les courbes, s'enivrer de la chaleur du son. La froideur de ce piano lui donne la nausée. Plus vite. Ses doigts danse à présent une danse effrénée. Elle n'est plus Niko mais Raphaëlle, le petit pantin maternel, un robot qui obéit aux ordres sans broncher. Plus vite. Ses mains lui font affreusement mal. Sainte Marie s'approche d'elle, referme le piano sur ses doigts. Elle crie mais ne pleure pas. Le sang tape dans ses frêles doigts, et l'adolescente aux nattes qu'elle est ne tourne même pas la tête. Elle ne contente d'écouter sa mère déblatérer sur la punition du bon dieu, sur oh combien elle est ingrate et qu'elle courait droit vers le châtiment. Oh oui, elle veut aller en enfer. Elle en rêve, et veut danser avec le diable en personne. Raphaëlle n'est plus. Raphaëlle n'a jamais été. Raphaëlle ne sera jamais plus.

   Son coeur lui crie de rester à ses côtés mais son corps l'emmène le plus loin possible de lui. Alors elle marche, marche jusqu'à temps de ne plus voir la moindre parcelle de lui. Pourtant ce ne fut qu'un simple concours de circonstance. Elle le revoit encore, avec son allure de baroudeur, mystérieux à souhait et son sourire enfantin s'arrêter sur le bord de la route. Elle s'approche de lui, un ses lèvres s'étirent en un sourire. Histoire simple pour relation compliquée. Elle veut juste rejoindre l'Australie pour côtoyer la mer qu'elle n'a jamais vu. Lui se contente d'explorer le monde. Les jours, les semaines passent et elle se noie dans ses yeux sombres, les cheveux dans le vent. Ils refont le monde, parlent sous les étoiles, vagabondent vers de nouvelles horizons. Alors qu'ils sont tout les deux, seuls au monde, une comète apparait. Il lui prend la main et elle fait un vœux.  Sentiments contre-natures, sentiments interdits. PJ est sa comète. Belle et partie aussi vite qu'elle est arrivée. Une comète ancré sur une parcelle de son corps. Pardonnez-moi mon père parce que j'ai pêché. Pêcher de trop s'approcher du soleil et de s'être brûlée.